Une Fleur pas comme les Autres
- Ombre Lunaire

- 6 mai 2022
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Assise sur un banc, munie de son stylo, Violette avait les yeux pensifs, fixant le paysage qui s’offrait à elle, et écrivant certainement ses poèmes si savoureux. Elle adorait se retrouver dans ce jardin de l’hôtel de ville, à n’importe laquelle des saisons, pour s’inspirer de son ambiance chaleureuse. Elle ne me voyait pas l’admirer : j’étais comme un idiot caché derrière une statue. « Elle est si belle », pensais-je, la déshabillant du regard. Les passants me prenaient sûrement pour un fou mais pour Elle je ferais n’importe quoi. Ma Violette a des yeux bleu électrique et envoûtants et la première fois que je les ai croisés, c’était il y a un an, à ce même banc. C’était le premier jour de printemps : il y avait des fleurs de toute part et de toutes les couleurs qui avaient envahis le jardin, ainsi que plusieurs groupes de gens qui riaient, des couples papillonnant et des filles de mon âge qui me lançaient des regards enchanteurs. Mais c’était elle, Violette, que j’avais choisie parmi tous ces gens fleuris. Dès lors où j’ai posé mon regard sur elle, je savais que c’était une fleur pas comme les autres : ses fossettes la rendaient si désirable, ses lèvres maquillées d'un rouge à lèvre rose pâle donnaient envie de les embrasser et ses cheveux couleur blé tombant sur ses épaules brillaient par le soleil du midi. Elle était éblouissante, irrésistible et rayonnante. C’était la première fois que je passais par ce jardin pour rentrer chez moi et je me suis dit que c’était le destin qui me faisait passer par ce chemin, pour tomber sur la belle Violette. Ce jour-là j’ai pris mon courage à deux mains et je suis allé m’asseoir à côté d’elle, sur le banc, l’air de rien. Elle m’a dit de son plus beau sourire, sans me décrocher un regard :
« - Il y a une dizaine de bancs vides dans ce jardin et tu t’installes sur le mien ? ».
Mes yeux ont scruté tous les bancs et je lui ai répondu :
« - Toi aussi tu aurais pu t’asseoir sur n’importe lequel des bancs ».
Elle éclata de rire tout en continuant de déposer ses mots sur son carnet. Mon regard ne put s’empêcher de la contempler : elle était tellement belle, concentrée et souriante ainsi. Violette du ressentir mon regard intense et se retourna vers moi. Et là, une explosion de petits papillons se firent ressentir dans mon ventre et dans ma tête. Dans tout mon corps en réalité. En un regard j’avais perdu les mots, mes mains étaient devenues moites et je ne voulais pas que ce moment s’arrête. Ses pommettes finirent par rougir et elle baissa les yeux, intimidée par ce moment déroutant pour l’un comme pour l’autre.
« - Cela va te paraître bizarre ce que je vais te dire mais je crois que je ne me lasserai jamais de te regarder matin et soir jusqu'à la fin des temps », lui avouais-je en cueillant une violette que je lui ai offert.
De ses yeux pétillant, elle accepta ma fleur et me chuchota gaiement à l’oreille :
« - Tu sais comment je m’appelle ? ».
Et je lui répondis tout bonnement :
« - Dis-moi.
- Violette » révéla-t-elle timidement.
Je suis resté abasourdi devant sa confidence et mes yeux vaquaient entre sa violette dans les mains et son visage réjoui.
« - Je…. Quelle coïncidence ! , dis-je toujours sous l’étonnement.
- Je t’avoue que tu es la première personne à m’offrir cette fleur, alors que tu ne me connais ni d’Adam ni Eve. C’est à la fois singulier et très surprenant venant d’un inconnu. Merci pour ce cadeau mémorable. », me répondit-elle en m’offrant un sourire angélique.
Elle déposa délicatement la fleur à ses côtés pour ne pas l’abîmer. Je me suis mis à sourire aussi, comme un idiot. « Dire que j’ai offert une violette à une Violette ! Je suis un génie incompris ! Ou j’ai juste une chance incroyable…. On part sur le génie ! », pensais-je. Soudain, Violette me tendis son carnet et me pointa du doigt un de ses poèmes. Je n’ai pas eu besoin qu’elle me le dise de vive voix, je compris par son regard enfantin et angoissée qu’elle me confiait la lecture d’un de ses écrits. Je me mis à le lire à voix haute, accompagné par le chant des oiseaux qui étaient posés sur une branche d’arbre au-dessus de nos têtes :
« Elle se cacha sous l'arbre fleuri, profitant du peu d'ombre qu'il lui offrait. Elle regarda le paysage et ne voyait aucun signe de vie : il n'y avait qu'un énorme jardin, le soleil, l'arbre et elle-même, nue sous son drap blanc. "Je vais me réveiller", se disait-elle. "Je suis juste dans un rêve". Mais ceci n'était pas un rêve. Pour son plus grand malheur, les lames tranchantes du Soleil avaient réussi à s'infiltrer entre les fleurs de l'arbre. Et c'est en voyant un halo autour d'elle, qui la protégeait des rayons, qu'elle comprit où elle se situait et qui elle était devenue : un ange ».
Mes yeux clignaient sans s’arrêter et ma voix ne pouvait plus prononcer aucun mot. Violette avait une plume enivrante, poétique et presque divine. J’étais totalement sous son charme. Je finis par m’apercevoir que ses jambes et ses doigts commençaient à bouger, montrant qu’elle trépignait d’impatience d’avoir mon avis.
« Violette, commençais-je, est-ce possible de tomber amoureux des mots d’une plume aussi charmante ?
- Je pense que oui… Je suis bien tombée sous ton charme dès que tu as réussi à me faire rire, m’avoua-t-elle maladroitement.
- Oh ! Cela peut devenir ma principale préoccupation de te faire rire, si tu le souhaites. Ici sur ton banc. Le mien aussi. Ce banc en bois usé où il y a déjà sûrement eu diverses rencontres, différents échanges. Ton rire étant la plus belle chose qui soit arrivée sur ce banc. J’en suis certain !»
Violette pouffa de rire, regardant aux alentours comme pour se rassurer que personne ne l’ait vu rire ainsi. Elle reprit son carnet dans ses mains, effleurant les miennes au passage. Son sourire éclaira à nouveau son visage et me fixa de son regard électrique. Des frissons parcoururent mon corps en un temps record et sur un coup de tête, mes bras l’attirèrent contre moi. Je la sentis se décontracter, nos corps fusionnant comme s’ils se connaissaient déjà et qu’ils s’étaient manqués. Plusieurs minutes s’écoulèrent sans que nous ne bougions l’un et l’autre, dans notre bulle, tandis que le jardin continuait de vivre par les passants âgés qui marchaient, le cris des enfants qui jouaient et les oiseaux qui virevoltaient. Violette finit par se retirer doucement, comme pour tenter de garder cet instant d’osmose qu’il y avait entre nous, puis m’avoua :
« On ne m’avait jamais fait un câlin aussi chaleureux. Que ce soit de ma famille ou de mes amis. Ça fait du bien… J’ai jamais ressenti ce sentiment de liberté, de réconfort et de sécurité dans les bras d’une personne. Je pensais même que jamais ça ne m’arriverait. Tu viens de me prouver le contraire, jeune inconnu.
- Je suis ravi d’avoir pu te faire ressentir ça. Ça ne met jamais arrivé aussi. J’ai senti que j’avais besoin de te prendre contre moi. C’est con, sachant qu’on ne se connait même pas assez.
- Il n’y a pas besoin de connaître une personne pour lui offrir ses bras, si c’est d’un accord commun. Surtout si les deux sentent cette connexion inexplicable.
Mon visage lui offrit mon plus beau sourire mais une sonnerie de téléphone coupa notre moment magique. C’était son téléphone qui jouait la musique Sors de ma tête d’Ogee. Violette s’empara de son téléphone puis ses traits heureux s’abaissèrent.
« Mes parents veulent que je rentre manger… Je suis si désolée de couper notre tête à tête. J’aurais voulu rester plus longtemps, me confia-t-elle.
- Oh non… Dommage. On pourrait se retrouver ici demain en début d’après-midi ? Qu’en dis-tu ?
- Ce serait avec plaisir, me dit-elle les yeux pétillants.
D’un commun accord, on s’échangea nos numéros de téléphone puis Violette prit ses affaires et me sourit en guise d’au revoir. Je commençais à partir aussi quand soudain je sentis une main se poser sur mon épaule et une petite fleur me demanda :
« Au faite bel inconnu, tu ne m’as pas dit ton nom. Comment tu t’appelles ? »





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